cahier critique 1
Préambules.
L’admirateur des œuvres de Djimé Diakité trouvera ici les notes des intentions artistiques pour chaque tableau. En 2OO2, c’était en revisitant les principes de l’esthétique négro-africaine que ce brillant ingénieur de haut niveau s’était résolu à lancer le manifeste « farafina-korofo/made in Africa », signifiant l’observatoire de l’art africain dans le monde. Chaque création de l’artiste représente une œuvre caractéristique de ce mouvement. Il a consigné les points d’observations des diverses compositions dans des fiches qu’il donne ainsi à la critique d’art, aux investigations des historiens d’art, afin d’agrémenter le recueillement des contemplateurs passionnés. La meilleure leçon à tirer de son expérience réside certainement dans son rapport à l’art, dans la mesure où pour lui, l’art est une aubaine qu’il a su mettre à contribution tant à manifester le dynamisme des puissances vitales, qu’à cultiver son mieux-être dans la vie réelle. Autrement dit, il s’est servi de l’art comme un medium pour revisiter son identité africaine, tout comme un outil pratique d’une échappatoire aux rudes conjonctures du sous-développement de son pays.
A défaut d’une analyse précise de la critique adaptée à l’art africain, les notes ci-après serviront à mieux comprendre les enjeux mis en œuvre. Ne pas connaître les discordances de cet art avec l’art occidental est la cause des équivoques et amalgames aux conséquences désastreuses, comme sa déviation qui est devenue le ‘’cubisme’’. Par conséquent, au moment d’aborder la contemplation esthétique africaine, on y gagne beaucoup à faire sienne la précaution d’Elsy Leuzinger : « Pour bien pénétrer son originalité essentielle, il y faut la disposition spirituelle voulue et une totale absence de préjugés ». Aussi, il faut signaler un écueil qui se trouve dans la philosophie de Baumgarten en matière d’esthétique : le mot esthétique est ambigu, car on y distingue deux facteurs dissemblables et inconciliables. Ce terme tiré du grec ‘’aisthésis’’ indique confusément sensation et sentiment, qui sont pourtant deux prémisses dualistes inconciliables. En effet, il contient deux cheminements de la pensée, voire deux approches créatives qu’il faut distinguer avec discernement pour ne pas s’égarer dans l’impasse, comme la thèse erronée de Léopold Sédar Senghor : « L’émotion est nègre comme la raison est hellène ». L’esthétique africaine, par sa démarche sensationnelle et efficace, se différencie de celle occidentale à vocation sentimentale et représentative. Tandis que la première se manifeste par ses modalités dynamiques et baroques, la seconde se caractérise par ses sous-entendus individualistes, nombrilistes.
L’esthétique négro-africaine souffre de beaucoup de controverses perpétrées par les divers analystes qui l’ont revisitée sans arriver à accéder à sa véritable réalité. Une première contrevérité à dénoncer prétend que la religion est la génitrice de tout l’art africain. Les spiritualités et les croyances mystiques africaines ne sont pas tout à fait des religions, car elles sont dénuées de doctrine religieuse. Par ailleurs, un aphorisme bambara indique : « dô naa dô dôn dô t’o dôn », pour signaler le caractère parcellaire et dispersé de cet art sur tout le continent. Que cela ne nous égare pas jusqu’à prétendre qu’il n’y a pas un seul, mais plusieurs arts africains. La force vitale bipolaire est l’agent actif de la créativité africaine, puisqu’elle est considérée comme une force occulte prodigieuse inspirée çà et là par la nature et la vie, et est susceptible d’être mise à contribution comme possibilité de promouvoir les perspectives de l’existence. Ce qui transparaît dans un autre aphorisme bambara : « N’i ko i be yiri dôn n’i m’a ladôn dôn, alisa i m’a yiri dôn » (Si tu prétends connaître un arbre sans savoir son guy-laurentus, alors tu ne possèdes pas toute sa connaissance). Tel est le fil conducteur de la thèse d’un seul art africain et d’un art africain éternel, toujours relatif à l’époque historique en cours. Si l’expressionnisme ou le fauvisme, le cubisme, le surréalisme se sont inspirés de l’art nègre, c’est parce qu’il est moderne et contemporain déjà dans sa nature essentielle.
La façon iconique africaine est caractéristique d’un art dense et synthétique qui n’applique pas le principe albertien de composition « l’œil ou la fenêtre ouverte sur le monde ». Elle procède de « la loi d’abstraction des contours de la forme, et de synthèse de l’idée incarnée » ; autrement dit, elle est l’œuvre d’une manipulation de l’image alors assimilée à une interface miraculeuse, source des puissances vitales. Il s’agit d’une approche d’imagerie emphatique faisant la liaison de l’image (ou symbole) et l’idée (ou concept), apparentée à la stéréométrie, l’idéogramme, la pictographie, l’hiéroglyphe. Les philosophes Amo du Ghana et Mveng du Cameroun ont analysé cette problématique, chacun séparément dans le livre « les philosophes africains par les textes ». Ces orientations sont autant de sources pour édifier toute âme, afin qu’elle ne soit pas tentée, comme c’est souvent le cas, par une lecture viciée essayant en vain d’assujettir les œuvres de l’art africain aux lois de l’art occidental.
Commentaires critiques des œuvres.
Janjo fasa : huile sur toile kaki, 70x50cm, 14-01-2007.
Une nuance de pléonasme plane sur l’intitulé afin de réaffirmer la volonté de revisiter précisément l’expressivité « fôlila » en tant que fonction du langage artistique dans l’art africain. A ce titre, ‘’fasa’’ en bambara est indicatif d’un genre stylistique élogieux des racines identitaires africaines, de la filiation des notables et la généalogie des grandes familles. C’est ainsi que « janjon » est l’expression de l’hommage rendu aux ancêtres mythiques, aux dignitaires et à l’héroïsme des braves gens. Au fond, la mise en scène est un prétexte trouvé pour s’opposer au style de composition des Beaux-arts, par une expérimentation de la frontalité et la symétrie équilibriste, qui sont plutôt usités en matière de figuration africaine. Le hiératisme inscrit aux figures provient de l’adoption d’un design relatif à la statuaire africaine ; d’où le rejet de l’anecdote dans l’expression du mouvement. De ce fait, la cadence rythmique est imprimée à l’iconographie du musicien à travers les décalages structurels entre la frontalité verticale de sa posture debout et le profil latéral de sa tête inclinée, avec la tenue oblique de l’instrument de musique. La beauté baroque de l’iconographie réside dans le saisissement époustouflant d’un musicien flanqué d’un instrument atypique, et aussi du caractère significatif de la sorte de sonorité que tout l’attirail impliqué suggère ; à savoir : une combinaison de la vibration d’une corde de bœuf, la clave d’une grosse bague d’argent tapant contre le manche de bois, le cliquetis métallique des anneaux de la crête, et l’amplification de toutes ces résonnances au sein de la calebasse. Le classique motif du repos des guerriers en posture assise, usité dans la statuaire à titre de cariatide, est remis à contribution à la fois pour signaler les participants en forme de bas-relief et en même temps, circonscrire la scène en servant d’arrière-plan.
Guada 3
Mise en scène éminemment impressionniste, mais abordée de façon expressionniste, tout en insistant sur l'aspect symbolique des icônes mises en jeu. La figure qui avive le feu symbolise le foyer, épistolaire de l'origine du monde. Les autres figures sont des archétypes de l'impatience et la famine, le dépit, la prostration, le désarroi.
Tellem grême.
Introspection et abstraction spéculative dans l'univers tellem, peuple d'antan, troglodyte, habitant des cavernes, des grottes. Illustré par une rhapsodie de morceaux choisis. La séance, en station assise est en accompagnement de la statuaire tellem et renvoi aux avatars : filèli kèla, laturu, kolonifilila, soma, dunkafa, nyôkônye, bulon lasiki, jamalajèn, baro. De la figuration sournoise, suscitant une allégorie énigmatique ; tantôt orphique ou surréaliste, tantôt mystique ou métaphysique.
Tellem grême-2: huile sur toile kaki, 65x92cm, 10-05-2010.
Est une allégorie figurative de l’univers tellem, avec une hypothèse dépeignant leur société troglodyte à l’instar d’un grême de gens enclins à l’animisme et la divination. L’effet de groupe des personnages assis en conclave reflète une vision à travers une abstraction spéculative pour atteindre à un langage graphique de genre syllabaire des images clairement perceptibles. La visibilité nette de cette écriture provient du contraste des traits de couleur terre de sienne brûlée sur le décor clair, tandis que sa lisibilité significative est le résultat d’une sélection expresse d’idéogrammes évocateurs de silhouettes en poses assises. La ronde qu’ils forment autour d’un rituel accoutumé, est perceptible par la disposition des icônes de cariatides en quinconces, et par l’alternance dans la juxtaposition des caractères en tons clairs et obscurs. La voûte de couleur ocre qui barre le haut rappelle l’univers fermé des habitants des cavernes ou des grottes ; mais aussi elle est assimilable au principe du toguna des Dogons obligeant les interlocuteurs dans une palabre à s’entretenir d’égal à égal, chacun étant forcé de s’asseoir à cause de la faible hauteur sous comble. On est saisi par le minimalisme de la composition acquis par la réduction extrême de la mise en scène à un seul ou à la rigueur deux éléments.
Fôyô-2:
Essorer le fonio sollicite le corps et l'engage dans des gestes dansants, comme une streep tease par inadvertance. La ligne du sol est abaissée pour rendre monumentales les figures du premier plan. Chaque élément est opposé à un autre ; et ainsi tout s'équilibre à travers de rapports de correspondances. La numérologie féminine du chiffre 4 est mise en exergue, avec une progression de 2 en 2. La géométrie des épures et l'apparence du grand écart constituent l'allure et la structure du corps mis en scène. Le dispositif du foyer avec les canaris surmontés de couvercle, est assimilé aux formes ascendantes du personnage qui se trouve baigné dans les écumes de fumée ; et entrevu parmi les cônes de toits de cases.
Fôyô-3 :
Mise en scène de la préparation culinaire du fôyô, un couscous à base de fonio. Les éléments symboliques de la représentation sont indicatifs de l'activité : la posture élégante de la ménagère, les accessoires et les ustensiles caractéristiques du sujet. Application magistrale de l'art de la récupération et la technique de l'huile sur du carton.
Fôyô-4: huile sur toile kaki, 92x73cm, 25-08-2010.
La préparation culinaire du ‘’fôyô’’, un couscous à base de fonio, est le prétexte trouvé ici pour donner libre cours à une poétique iconographique doublée d’une abstraction sculpturale des formes stylisées. Essorer le fonio sollicite le corps et le soumet à des gestes rythmés, à l’instar d’une sorte de danse acrobatique par inadvertance. Les éléments symboliques mis en œuvre sont indicatifs des péripéties de la performance de l’activité dont il s’agit : les sollicitudes des formes du corps svelte à cause de la posture élégante de la ménagère, le langage significatif des ustensiles et accessoires caractéristiques du sujet. On est saisi par le remarquable minimalisme de la mise en scène, acquis par la réduction extrême de la figuration à deux icônes significatives, avec une ligne brisée des toits de cases à l’arrière-plan participant au dynamisme de l’enjeu. La composition est assujettie à une numérologie du chiffre 4 mettant en exergue la symbolique féminine en milieu Bambara, suivant le rythme d’une évolution progressive de 2 en 2. Chaque élément est contrebalancé d’un autre qui entre en opposition avec lui ; et ainsi, tout s’équilibre à travers un système de rapport de correspondances s’établissant entre les dispositifs mis en jeu. La géométrie des épures et l’apparence du grand écart donnent à la jeune femme l’allure de sa posture, et la structure de son corps soumis à l’abstraction iconographique. Le dispositif du foyer à deux pierres, avec les canaris surmontés d’un couvercle, est assimilé aux formes ascendantes du personnage qui se trouve baigné dans les écumes de fumée, et encadré par les cônes des toits de cases. La ligne du sol est abaissée au maximum afin de rendre la monumentalité aux figures au premier-plan.
Diya bara :
Sira bara, didaka…indiquent les usages de la boîte design des captifs senoufo. La mise en scène d'un récit de conte a placé l'objet d'art au focus du centre d'intérêt. Cela permet d'exalter la figure de style anthropomorphique dans la statuaire africaine. La caricature résume le monde au plaisir hédonistique du diya ; et présente l'homme qui marche avec le fardeau de ses vices ; les partisans des délices vivant dans l'exploitation des fruits du travail d'autrui. La position de la boule sur la nuque indique l'équilibre, et l'aplomb du poids de la structure sur le tarse des pieds du colosse.
Diya bara 2: huile sur toile kaki, 92x73cm, 12-06-2010.
Est la mise en scène d’un contenant design des captifs sénoufos. Comme cela est perceptible à travers l’intitulé, le contenu de la boîte demeure ambigu, parce qu’il est supposé être le miel, parfois le dolo ou bien le tabac. C’est dans ce dernier cas que la statue en question est cataloguée dans la statuaire africaine comme étant la tabatière des esclaves sénoufos. Que son usage soit contenir le dolo, voire les ingrédients d’un fétiche, ou un stupéfiant, en tous les cas son stylisme anthropomorphe signale une allusion à un esprit dionysiaque, et véhicule une signification caricaturale réduisant le monde au plaisir hédoniste du diya (en bambara, les délices de la vie). C’est ainsi que sa métaphore présente l’être humain marchant sous le fardeau de ses vices ; et les adeptes des délices, vivant dans l’exploitation des fruits du travail d’autrui. Une prouesse significative de cette iconographie est la position de la boule sur la nuque, correspondant au point d’équilibre, soit l’aplomb du poids de la structure sur la plante du pied du colosse. L’artiste a agrémenté la figuration par le récit d’un conte à parabole, dans lequel une meute de singes accueille avec réjouissance et ruade le bougre qui amène la calebasse de miel à leur clairière. C’est précisément cette résolution de la scène qui place l’objet d’art au focus du centre d’intérêt, et enclenche une animation à titre d’une performance évocatrice de sa signification. La gravure de la croix de l’effigie kanaga sur la sphère n’est qu’une rime entrant en rapport de correspondance avec le même genre d’écriture inscrit à la stylisation d’un singe sautillant pour atteindre la hauteur d’un autre déjà juché sur le couvercle, à sucer goulument les doigts maculés de miel. Sans le pouvoir imaginatif de cette inspiration, on n’aurait sans doute pas envisagé cet artéfact sous l’angle de cette vision d’artiste.
Siaka zulu (1787-1828) : huile sur toile cretonne, 70x50cm, 1-01-2007.
Figures sombres se détachant sur fond clair. Le fondateur de l'empire zulu est l'incarnation de l'œuf, la graine, le soleil ; soit le fils du ciel. Figuration danse acrobatique de chasseur guerrier. L'insigne en haut du visage est celui du fétiche kôntrôn des donso, en bamanan trappeur, scout, guerrier. Le bracelet de poignet et le bagan qui est le gris-gris de bras symbolisent le soma, féticheur guérisseur.
Dunkafa : huile sur toile, 40x30cm, 10-07-2006.
En bamanan manger à satiété. Métaphore de la vertu, de l'abondance et le salut. Figuration allégorique sous prétexte de mettre en scène l'appétit (acte de manger) de la femme et l'enfant et l'envie des animaux. L'opulence et le besoin. Remarque : l'aplomb de la figure est déplacé vers le repas.
Dunkafa-2 : huile sur toile cretonne, 70x50cm, 12-01-2007.
En bamanan manger à satiété, à être repu ; soit l'abondance et la prospérité. Scène de repas de femme allaitant un enfant, assise sur un escabeau design, avec animaux de compagnie à l'affût des restes. Profil numismatique d'une sindila, en bamanan la maternité et l'allaitement du bébé. Telle est l'association de deux genres artistiques différents. Métaphore, symbolisme, allusion et allégorie des contraires : amitié-convoitise, partage-envie, jalousie-convivialité.
Basa : huile sur toile cretonne, 70x50cm, 5-02-2007.
Un cercle blanc montre le profil numismatique d'un basa,margouillat agame africain. Un carré jaune ocre encadre un tireur à l'arme blanche manabèlè, en bamanan lance pierre du bilakoro donso ; le gamin est affublé de sa besace npalan. Alternance de bandes horizontales plus ou moins larges de jaune, blanc, vert-jaune des herbes de la savane sahélienne du pays bamanan. Figuration de la performance d'un jeune chasseur donso bravant les esquives de sa proie afin de survivre.
Dakasikila : huile sur toile kaki, 70x50cm, 10-02-2007.
En bamanan poser la marmite sur le feu afin de cuisiner. Profil numismatique de femme baissée, penchée sur un canari, tenant sonkalan soit une spatule agitatrice de bois sculpté ;portant au dos un enfant à califourchon. Métaphore, allégorie et paradoxe du noir blanc,black & white,peau noire-masque blanc de Franz FANON. Combinaison des arcs, courbes ; des contrastes opposés immédiats, des rayures façon kôba, pagne bamanan en coton de rayures bayaderas multicolores.
Tofasala : huile sur toile kaki, 70x50cm, 12-01-2007.
La cuisine du to est le plat bamanan le plus caractéristique, mais par extension to signifie tout acte de cuisiner et tout repas. La figure de profil numismatique,assise sur un escabeau, est une combinaison de lignes zig-zag et v avec des arcs,des courbes. Le graphisme des rayures bayaderas adopté est celui du kôba, pagne bamanan tissé coton en bandes multicolores.
Bafaro maa :huile sur toile kaki,70x50cm,14-02-2007.En bamanan la sirène génie des fleuves et rivières,des mares ;souvent associée au lamantin,mamifère cétacé herbivore des fleuves d'Afrique.C'est l'autel du serpent mythique saba,l'ancêtre originel.Figuration abyssale du génie mamy water assise,les bras levés,se prélassant avec oisiveté.Allégorie du symbole kanaga de l'origine du monde, de la création et de la vie.Design des accessoires intimes.
Bukunieri : huile sur toile, 40x30cm, 8-03-2006.
En bamanan bonne femme domestique chargée de tous les travaux de ménage d'une famille. Le pilage du grain (en bamanan susuli) est le prétexte. La métaphore du baobab évoque l'acte et la gestuelle. L'axe vertical du pilon (en bamanan kolon-kalan) entraîne une symétrie et une composition en cascade et des portions du corps. Idem pour les coloris cloisonnés.
Bukunieri-2 : huile sur toile cretonne, 70x50cm, 12-01-2007.
En bamanan boniche femme de ménage. Susuli, l'acte de piler prétextant la mise en scène, est une figure de style qui se pratique partout au monde. Toute la figuration se passe sur un bloc de colonne verticale, à l'instar du design baobab stylisé femme élégante pour le suggerer. Raccourci et frontalité de l'icône. Usage abstrait de la couleur par aplats cloisonnés all-over. Remarquez design boucles d'oreilles.
Femme style : huile sur toile, 40x30cm, 25-07-2006.
Manière fantasque, exhibitionniste, d'une porteuse vendeuse de face, marchant, attachant un paréo de pagne vert. Mirage saisissant par l'apparition d'une manière façon top model, soit femme style. Almée noire avec un cache-sexe de triangle vert. Allure d'un oiseau qui prend son envol ; ou bien un papillon déployant ses ailes.
Black & white : ballpoint pen sur papier125gm2, 42x29.7cm, 30-08-2006.
La figure est un archétype prétextant la performance. Combinaison de courbes, de ronds et sphères traduisant le sujet. Graphisme à base de rayures, contrastes immédiats des contraires noir blanc, positif/négatif. Mode opératoire inversé : gravure au poinçon sec, fusain et crayons pastel, fixateur, dessin à l'encre de stylo à bille.
Bila : ballpoint pen sur papier125gm2 ; 29,7x42cm, 25-08-2006.
Signifiant en bamanan cache-sexe ou slip, bila est le prétexte à la performance. Etat d'âme nostalgique d'une figure couchée de face. Graphisme à base de rayures, contrastes immédiats des contraires noir blanc, positif/négatif. Mode opératoire inversé : gravure au poinçon sec, fusain et crayons pastel, fixateur, dessin à l'encre de stylo à bille.
Jali dôn : fusain et crayons pastel sur papier 50gm2, 29.7x21cm, 18-09-2006.
En bamanan et en malinke danse de griots; qui constituent un groupe ethnique de l'Afrique de l'ouest. Leur danse est une transe, une danse de possession, qui ressemble à un saut en l'air libre et acrobatique rappelant l'envol d'un paloma : la grue couronnée. C'est la performance, l'artéfact et le happening d'une chorégraphie fantasmagorique aux effets troublants, avec des visions spectaculaires.
Black star : fusain et crayons pastel sur papier 50gm2, 29.7x21cm, 22-09-2006.
Figurine féminine évoquant la danse d'Alegria des griots. Au-delà de cette transe de danse de possédée, c'est la figuration d'un buste, un corps nu transparaissant à travers la mosaïque des couleurs mis en jeu. Allégorie et métaphore d'une paloma (grue couronnée) s'envolant ; soit la danse du feu, soit la présentification de la fête du serpent mythique saba.
Woloso fever : fusain et crayons pastel sur papier 50gm2, 29.7x21cm, 09-2006.
Figurine de femme accroupie, dansant, de profil. Woloso désigne un groupe ethnique et une caste de l'Afrique de l'ouest. Au-delà de leur rôle social leur verbiage, leur bouffonnerie et leur danse sont des expressions libres souvent truculentes : dénudages, exhibitionnisme et autres provocs. Danse érotique, danse du ventre, danse du sexe, streep-tease, danse diabolique.
Hé ! tumu-tumu
Bangali tumu-tumu
A bila un'kôfè
I k'a bila un nyèfè,
Maani ! Maani !
……………….
Wolosow Yoh !
Un ye munu kè aw la?
Timini Baba timini.
Kelen tè anw ka so
Un ye munu kè aw la?
Timini Baba timini.
Fila tè anw ka so
Un ye munu kè aw la?
Timini Baba timini.
Saba tè anw ka so
Un ye munu kè aw la?
Timini Baba timini.
Kelen tè anw ka so
Ah! timini Baba timini.
Ah! timini Baba timini.
Kôntrôn : dessin à l'encre de photocopieuse, correcteur Blanco, crayon couleur jaune ; format A4, date ?
De prime abord la numérologie du chiffre 3 indique le genre masculin ; car kôntrôn, en bamanan est la dénomination d'un fétiche puissant et mortel qui est maintenu ésotérique et machiste à cause de son caractère misogyne.
D'après Cheick Anta DIOP, c'est l'esprit nain de la brousse qui marche avec sur la tête un ustensile porte-bonheur. C'est pareil à Adonkulu chez les Dogon ; et la même représentation est dénommée autrement en pays Wolof, Sérère, etc. L'archétype de figure porteuse renvoi aussi au Siki, qui représente la figure de tête de bovidé aux cornes recourbées vers l'intérieur, en guise de cercle, comme pour renfermer le rond du soleil ; dans ce cas, il y a la correspondance avec des représentations de l'Egypte ancienne.
Le tableau semble être une mise en scène anodine de porteuses, mais il est plein de significations diverses. La figuration associe 2 archétypes, soit 2 figures de styles de la statuaire : les bras levés, les porteuses.
L'alignement linéaire est une façon de l'art d'installation établissant une synergie ou une dynamique de rapports de correspondances qui signalisent les symboles de forces : boucle d'oreille Fakoli, gri-gri en collier de cuir Garankè, finsiki (substrat de couche en nid pour porter sur la tête).Tout cela indique les principes des charges fétichistes en magie noire : boli, tafo, djo, daka, npalan (sac gibecière en bandoulière) ; c'est-à-dire récipients, autel, charges animistes africains.
Mise en œuvre de l'art de la récupération, allant au-delà d'un simple processus de recyclage de matériaux, mais consistant à un double piratage : et de l'image préalablement dessinée, et mise à profit de l'appareil photocopieur fin d'obtenir un noir profond ; c'est-à-dire construire/fabriquer l'œuvre en procédant par photo copiage, en sorte d'art conceptuel.
L'étymologie de kô-ntôrôn désigne la « patte arrière », tout comme le talon de Achille, soit l'arme fatale. C'est le principe de l'art d'inverse et du revers : ladôn, yiri jatiki faka. Nonobstant la dualité de la charge + ou – de la force vitale ; l'endroit équivaut à l'envers, mais de pôle inversé selon l'enjeu de la situation. Et cela met en exergue maintes sortes de performances, telles que le procédé esthétique de construction/fabrication en une seule session, à la prima, c'est-à-dire l'art de commencer l'ouvrage par la finition, en brûlant les étapes ; en d'autres termes, l'art d'assaut des africains.
Fabuleux destin de Sunjata Kéïta.
(Critique 3 versions Sunjata).
1-Intro :
Voici réunies les analyses critiques des compositions en hommage au héros légendaire Sunjata kèyita. Cette présentation est successivement constituée des titres :
-analyse critique du tableau ''mari jata'',
-analyse critique du tableau ''makan sunjata-1'',
-analyse critique du tableau ''makan sunjata-2'',
-article ''fabuleux destin de Sunjata Kéïta''.
Dans l'histoire de l'humanité il y a certes eu beaucoup de héros et beaucoup de titans, mais personne n'a été aussi fort et magnifique tel que makan sôn jata kèyita, car il est parti du destin social le plus bas de handicapé perclus des jambes, pour arriver au plus haut sommet d'empereur.
Sa légende est d'autant plus fabuleuse que c'est à la suite des ''kun ma suulu'' (humiliations) que ce preux mandingue réalisa ''kun kô rô ta'' (vengeance). Aucun herculéen n'a encore réalisé la geste de Sunjata dont le symbole le plus évocateur est récité dans la poétique du ''sira bulu'' et celle du ''sinsin bere'' ou bien ''sunsun bere''.
Ce guerrier héroïque est à l'origine de ''kulu-kan-fuka'', manifeste panafricaniste dont les rémanences pragmatistes perdurent jusqu'à nos jours, avec la constitution d'une confédération qui a jeté les bases d'une civilisation qui demeure encore vivace dans les terroirs africains, et dont les traces indélébiles sont leur rayonnement culturel dans le concert des nations du monde.
2-Analyse explicative des tableaux :
En référence à une épigraphie concernant :
-Pop. : « yeko ye fôko ban, nga lankali bè dô fara ye nyèla kan ».
-Pop. : « yeko de ye fôko ye ».
-Pop. : « filèli, yeli, ye nyèla, nyèla ye ».
-mari jata : huile/toile, format 40x30 cm, 2006.
-makan sunjata-1 : huile/toile, format 70x50 cm, 2007.
-makan sunjata-2 : huile/toile, format 92x73 cm, 2010.
-a) mari jata :
Huile sur toile cretonne, 40x30cm, 20-01-2006. En malinké le lion du Mali, est Sunjata (1230-1255), héros mythique et légendaire des mandingues Kéïta (signifiant hériter). Fondateur de l'empire du Mali. Figuration allégorique de la bravoure et de la prouesse de la personne en acte. Performance du passage de l'état d'handicapé perclus des jambes à celui de la station débout. Métaphore de la force, le geste juste, l'effort parfait et de la volonté de pouvoir.
-b) makan sunjata-1 :
Makan Sunjata (1190-1255) :
Huile sur toile cretonne, 70x50cm, 20-01-2007.
Figurine d'homme arc-bouté sur un pieu, en acte de performance. La mise en scène est à l'instar d'une installation à titre d'autel kulu-kan-fuga, par l'association de la légende et des symboles de la geste du récit épique de mari jata, le lion du Mali. Différents accessoires sont proposés d'après une conception design : le gris-gris de bras bagan, le bracelet de poignet, la boucle d'oreille, le baobab, le lion jata. Adoption des coloris du drapeau malien vert jaune rouge pour évoquer le fondateur de l'empire du Mali. Il est le symbole du héros perclus des deux jambes, mais qui obtint la gloire d'être grand chasseur ''simbo'' et maître de combat ''kèlè mansa''. En dépassant progressivement ses propres limites, il est arrivé en 1235 à s'imposer, dans l'issue de la bataille de kirina, au roi numu (en bamanan caste des forgerons) du Sosso (dans l'actuel Banamba). Sumaoro Kanté (1203-1235) qui fut mis en déroute, était terrible tant par son pouvoir sorcier, que par son règne despotique, son autorité tyrannique, et surtout son vêtement fait de peau humaine. Makan Sokolon Jata Konaté, alias ''mari jata'' est l'ancêtre des kèyita ; il fut le souverain mandingue qui fonda l'empire du Mali. C'est lui qui initia des facteurs de cultures et des marques de civilisation dans la presque totalité de l'Afrique de l'ouest.
Ce tableau est un assemblage de figurines dans l'esprit du kulu-kan-fuga. Il propose une composition virtuelle d'ensemble, et une conception design de la façon de l'objet fétiche.3 axes verticaux sont combinés avec 3 bandes horizontales coloriées. La médiatrice verticale est une structure composée de jambes, cuisses, mains et bras ; avec comme centre la tête frontale et baissée. Le personnage ainsi rendu par le style de la statuaire africaine constitue une image numismatique de celui qui fut à l'origine de la confrérie des donso. Les lignes en forme de L, X, Z, E, sont mis en jeu dans la structure ; cela crée forcément un rythme dynamique dans l'espace tridimensionnel et la perspective virtuelle créés. Graphisme avec rythme en entrelacs, en puzzle, à l'instar des lutteurs, soit deux ou plusieurs corps à corps, soit un corps en lutte acharnée.
NB-Ce tableau a été remis par équivoque au Président de la République du Mali, Ahmadou Toumani Touré, lors de son passage du 15-03-2007 à Bougouni, avec pour objet : « transmettre l'œuvre à la Nation malienne ».
Par ce moyen, l'artiste cherchait à se faire médiatiser afin de contribuer à sa propre promotion. Mais de tierces personnes avaient délibérément enlevé la lettre qui accompagnait le tableau. Le peuple malien n'en a rien vu, et toute trace du tableau est perdue. Par la suite, l'artiste a demandé s'il pouvait recevoir au moins une lettre de remerciement ou bien une autre marque de reconnaissance de ''Kuluba'', afin de se faire valoir avec cela ; mais là non plus, personne n'a daigné répondre.
Telle est la raison de la recomposition de makan sunjata-2.
-c) makan sunjata-2 :
Met en scène une perspective niangaran, ce qui en bamanan indique la monumentalité, le gigantisme et la grandeur. Tel est le style qui exalte mieux l'univers de titan héroïque dont il est question.
La figuration est celle d'un bonhomme arc-bouté sur un bâton pour se mettre débout et marcher.
La performance débute avec ''sinsin nan'', c'est-à-dire ''sunsun bere'', qui est la symbolique du sceptre en insigne de pouvoir. Le bois de l'arbre sunsun étant réputé résistant, cela rappelle les sens paraboliques ''kolo ni fasa, ani fanga fin'' signifiant alors : la détermination du barika, la volonté extraordinaire soit l'âpreté de la force par laquelle sunjata à vaincu son destin d'invalide perclus des jambes. Et puis sa geste se poursuit par le déracinement d'un pied de baobab ''zira ju'' qu'il a planté auprès de la case maternelle. Tout cela constitue des actions d'éclats et des hauts faits qui prouvent du courage et de la bravoure.
La présentation frontale conduit à l'adoption du raccourci réduisant le personnage à une icône de figure d'homme dont la structure est quasiment restreinte à une tête, deux bras, deux pieds.
Le vêtement ''kôbila-nyèbila'' dont les tissus pendent sur l'épaule et les bras sert à équilibrer la répartition du corps et des masses d'ensemble de part et d'autre de la médiane du bâton tenu vertical ; et sur lequel s'agrippent les mains, tandis que les pieds s'appuient à côté sur le sol.
Les deux figurines, à savoir le lion ''jata'' et ''zira'' le baobab sont des conceptions design d'accessoires purement décoratifs qui sont mis à contribution ici pour équilibrer la mise en scène. L'une féminine et l'autre masculine, peuvent être aisément interprétées du point de vue artisanal.
3-Le fabuleux destin de Sunjata Kéïta :
Il y a une histoire obscure de sorcellerie ésotérique ''suya, nyèguan'', à la base du récit de l'épopée mandingue.
Le titre héroïque de ''simbo'' est la marque d'excellence des ''donso'', chasseurs guerriers, qui constituent une confrérie autour des secrets du ''ntanan'', qui représente d'ailleurs un fétiche mortel.
Le buffle du Doh désigne le domaine mystérieux des oracles et la thaumaturgie qui ont prophétisé la naissance de l'enfant prodige Makan kèyèta baka sokolon jata Konaté.
''Sèkè'', en bamanan l'épervier, est l'oiseau qui frappe sa proie dans le vol plané comme l'éclair. Ainsi était le pouvoir thaumaturgique du roi sorcier Sumaoro Kanté, dont le totem ''tana'' était l'ergot du coq blanc. A force d'être puissant, il était devenu un roi tyrannique et despote. C'est lui qui intitula le premier griot ''kouyaté'' de l'histoire. Il fut l'auteur de la célèbre citation malinké : « ni i ye i ka wulu juku faka ko a ka farin, môkô wèrè ta wulu farin ba na tô i kin » (Si tu abas ton chien méchant parce qu'il est féroce, le méchant chien d'autrui te mordra ».
Voici en suite le récit rendu bref :
L'histoire du Manden raconte que le roi de Kri, capitale Dakadyalan, Naré Makan Konaté, alias Kenyi (le beau) épousa Sokolon Kondé, alias Kèju, kuduma (laide, bossue), parce que les devins lui avaient prédit qu'elle engendrerait le plus grand homme que la terre du Manden ait jamais porté.
Sokolon Kondé était laide, repoussante ; elle portait une énorme bosse sur le dos. On disait qu'elle était le double du buffle solitaire ''siki dan kelen'' de Do, c'est-à-dire une autre métamorphose de Kamisa Do, princesse sorcière du Do (contée située entre Koulikoro et Ségou) ; qui avait le pouvoir de se métamorphoser en buffle, forme sous laquelle elle semait la terreur dans la région.
Sunjata, l'enfant prédit, ne daigna pourtant marcher qu'après dix ans. Le roi n'eût pas l'opportunité d'assister à l'accomplissement de son destin. Son invalidité lui sauva la vie quand Sumaoro Kanté, roi entre 1203-1235 de Sosso, dans l'actuel Banamba, envahit le Manden et le soumit à d'incessantes exactions et razzias.
''Zira bulu'' est la référence poétique à la poignée de feuilles de baobab pour faire la sauce de to (pâte de mil) que sa mère quémanda à sa co-épouse Sasuma Berete qui lui refusa en rétorquant par des paroles méchantes et blessantes. Cet affront qui fit pleurer sa mère fut le déclencheur de la geste de Sunjata.
D'après la tradition, désireux surtout de secourir son pays, il fit mander alors le forgeron de son père lui fabriquer une barre de fer de six coudées. Cette barre ploya sous le poids de son corps. On lui suggéra ensuite ''sunsun bere''. C'est ainsi qu'en s'appuyant sur le sceptre en insigne du pouvoir de son père, il pu se mettre sur pied.
Par la suite, la mère aussi rendit l'âme avant que ne s'accomplît le destin de son fils. Elle savait qu'elle était son anti-destin. Venue au monde pour engendrer Sunjata, elle devait le quitter pour permettre à son destin de s'accomplir.
Aucune arme ne pouvait anéantir le roi sorcier Sumaoro Kanté ; seul l'ergot de coq blanc, accroché à un arc, s'il l'atteignait pouvait le tuer. C'était là son secret et dans un moment d'égarement, il le révéla à Nana Triban son épouse qui, dès qu'elle l'apprit, s'enfuit pour aller le livrer à son frère Sunjata. La trahison légendaire de Nana Triban permit ainsi la victoire des malinkés sur les gens du Sosso ; c'était à la bataille de Kirina en 1235.
Après la défaite de Sumaoro, ''bèe mara mansa'' est le titre d'empereur que Sunjata (1235-1255) reçut ; ce qui lui permit d'unifier le Manden et de l'agrandir dans le cadre de l'empire du Mali. /.
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